Le piège du tout ou rien

Tu connais la logique du tout ou rien ?

Elle te fait croire, quand tu démarres un projet, que si tu n’en viens pas à bout tout de suite et en une seule fois, ça ne vaut pas la peine de t’y lancer du tout.

Par exemple, si tu veux faire le vide dans tes affaires (et que ça promet d’être plutôt long), c’est elle qui essaie de t’en dissuader avec des messages du type : “il y en a trop, tu ne pourras jamais tout faire aujourd’hui. Attends plutôt les prochaines vacances, tu auras vraiment du temps pour faire ça bien.” 

Pour Monsieur Toutourien, soit on fait tout, soit on ne fait rien. Pas d’entre-deux, pas d’étape intermédiaire, pas de petit pas.

Si tu as déjà été victime du Tout ou Rien, alors cet article est pour toi !

Quand l’envie de bien faire te pousse à ne rien faire

La logique du tout ou rien est intrinsèquement liée à une fonction de préservation du cerveau : éviter les efforts inutiles, pour conserver l’énergie. 

Toi, tu le sais que chaque petit effort, mis bout à bout, produit des résultats plus grands. Mais il y a une partie de ton cerveau totalement hermétique à ce concept ! D’après elle, pour que tes efforts valent le coup, il faut en cueillir les fruits sur le champ.

Si tu lui demandes de faire des efforts sans récompense immédiate, elle va tenter de te convaincre de laisser tomber, au moins jusqu’au moment où l’effort sera immédiatement suivie du résultat.

Problème : le jour où tu as devant toi des plages de temps assez longues pour désencombrer toute ta maison n’existe pas !
Et tu n’es pas sur-humain-e non plus. À un moment, tu vas être interrompu-e par quelqu’un, par la faim, la soif, et tu vas aussi avoir besoin d’un break parce que trier, c’est décider et décider, ça fatigue. 

Donc en gros si tu attends les circonstances idéales pour faire tout ton tri d’une traite, tu risques de ne jamais t’y mettre. C’est un paradoxe, non ? En te convaincant de faire tout bien, M. Toutourien te pousse insidieusement vers le RIEN.

Sauf qu’en secret, tu continues de détourner le regard devant tes placards qui débordent, et de te décevoir de ne pas tenir tes promesses envers toi-même. En plus, pendant ce temps-là, les objets continuent de s’accumuler.

Quand tu en as tellement marre du bazar que tu balances tout d’un coup

Après des semaines ou des mois de flemme, il arrive qu’un coup de colère pousse à attraper tout ce qu’on a sous la main. Direction la poubelle. Pas de vérification. 

L’avantage c’est que c’est fait (et le cerveau adoooore quand c’est fait). 

L’inconvénient c’est qu’il n’y a aucun discernement. Or, trier consiste à prendre une chose à la fois pour discerner ce qui sert encore, et le reste. 

Le risque en jetant tout comme ça, c’est de jeter des objets de valeur, des choses auxquelles d’autres membres du foyer tiennent, des documents importants. Tu sauras de quoi je parle si tu t’es déjà retrouvé·e sur le trottoir un soir à fouiller les bennes à la lueur de ton téléphone, pour réaliser, horrifié·e, que le camion-poubelle était déjà passé.

À quoi ça ressemble d’échapper au tout ou rien ?

Puisqu’on ne construit pas grand chose avec le Tout ou Rien, comment faire pour le déjouer ?

En empruntant un chemin d’équilibriste ! 

Premièrement : ne pas se mentir et accepter d’emblée que puisque ça nous a pris des années à tout accumuler, ça va aussi prendre des années un certain temps à trier.

Ensuite, appliquer ces principes plus puissants qu’ils n’y paraissent :

1. Savoir où tu veux aller

L’idée, c’est de montrer à la petite voix décourageante le résultat final. Le visualiser, le voir dans ta tête sous toutes les coutures. (il y a un exercice pour cela à télécharger gratuitement ici). Ainsi, tu aides cette partie du cerveau à sortir de l’immédiateté, et tu lui montres où tu vas l’emmener. Ça lui donne envie de coopérer au lieu de te mettre des bâtons dans les roues!

2. Découper le projet en plus petites étapes.

Puisqu’il est acquis que tu ne feras pas tout le même jour, tu vas décomposer la mission en plusieurs étapes. Et accomplir chaque étape l’une après l’autre. Tu définis le jour, la durée (la plus réaliste et acceptable par ton cerveau), l’action à accomplir. 

Ça donne : samedi prochain, de 9 h à 10 h pendant que les enfants sont à leur cours de judo/danse/piano, tri du meuble de l’entrée. 

Et samedi à 9 h, tu t’y tiens (c’est la partie qui demande le plus de discipline, de faire ce qui était prévu).

Tu vas ainsi optimiser des plages de 30 à 60 minutes pour avancer pas à pas.

3. Commencer par les parties faciles

Plus tu tries, plus le muscle de la décision se développe : ça devient plus évident de savoir si un objet a encore une raison de rester chez toi, ça devient plus facile de lâcher quelque chose dont tu n’as plus besoin.

Donc, commencer par les catégories d’objet faciles (je me joins à Marie Kondo qui conseille de démarrer par les penderies) et terminer par les plus difficiles (les souvenirs et les photos). 

Comme pour un entraînement sportif, tu vas t’échauffer en douceur avec les vêtements, et tes muscles seront en béton pour gérer la difficulté face aux objets plus affectifs.

4. Célébrer chaque avancée

Tu te souviens ? Le cerveau aime récolter les récompenses pour ses efforts. En plus ça le motive à continuer !

Offre-toi une forme de récompense à chaque fois, sous la forme qui te plaît :

• faire une photo avant/après.
• cocher la case sur la to-do list. 
• la vue d’une armoire moins chargée, d’une étagère allégée, d’une pile de papier éliminée, peut aussi te faire ressentir une bouffée de satisfaction qui te donnera des ailes. 

Ainsi, tu vas prendre appui sur chaque étape accomplie pour poursuivre vers la prochaine. 

Montre à ton cerveau (et à M. Toutourien) comment tu avances, un pas à la fois, en respectant ton énergie et autorises-toi même à être fièr-e de toi !

Promis, tu accompliras beaucoup plus sur ce mode qu’avec le TOUT ou RIEN.

Bon tri, et dis-moi comment ça a marché pour toi.

Photos de Jess Bailey sur Unsplash